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Bonjour c’est Tadashi Ono

Je suis artiste-photographe et je travaille entre Arles et Paris. Mon travail questionne les diverses formes que les êtres humains produisent et représentent en interaction avec la nature. En bref, de l’architecture aux taches de peinture, des forêts artificielles aux lichens sur les pierres. 

Depuis 2011, je documente la transformation des paysages maritimes du Tohoku, la région du nord-est du Japon dévastée par le tsunami. J’explore également les modifications de l’espace public après les grandes manifestations de 2013 au parc Gezi à Istanbul. Actuellement, je me consacre au développement des flores arlésiennes pendant la pandémie, ainsi qu’aux patrimoines vivants du massif des Maures, entre Hyères et Saint-Tropez. 

Mes expositions récentes ont été accueillies aux Rencontres d’Arles en 2024 et cette année au FRAC Auvergne à Clermont-Ferrand.

Les photos qui illustrent l’article intitulé «Un barrage contre le Pacifique» proviennent de mon projet Coastal Motifs. Une série de 55 photographies représentant les paysages des régions côtières du Tohoku, dévastées par l'enchaînement de la triple catastrophe du 11 mars 2011 : le tremblement de terre, le tsunami et l’explosion de la centrale nucléaire de Fukushima. Cette série constitue le deuxième volet de mon travail sur le paysage du Tohoku. Elle fait suite à From the 247th to the 341st Day, Tohoku, une première exploration que j’avais réalisée en parcourant les points d'atteinte du tsunami entre 2011 et 2012.

En retournant à Tohoku six ans après le tsunami, je fais face à un paysage maritime radicalement transformé. Une digue massive, d’une dizaine de mètres de haut et s’étendant sur 400 km, est en cours de construction,  pour un coût dépassant les 7 milliards d’euros. Face à cette réponse du pouvoir politique japonais au plus grand cataclysme de ces cent dernières années, je m’interroge sur les conséquences écologiques, économiques, mais aussi civilisationnelles qu’une telle infrastructure peut engendrer.

Le Japon, nation intrinsèquement liée à la mer, semble aujourd’hui vouloir s’enfermer derrière ce mur de béton qui obstrue la vue sur la mer et rompt le dialogue ancestral avec l’océan. Parcourant la côte, de baie en baie, comme un pèlerinage, je cherche à décrire ce paysage où l’océan est devenu invisible. Mon attention se porte particulièrement sur les «motifs» : non seulement la structure de béton elle-même, mais aussi tous les éléments qui composent ce paysage, tels que la mer, le ciel, les montagnes, les arbres, les herbes, les rochers, les maisons et les routes. C’est comme si ces éléments continuaient de témoigner d’une forme de résistance contre la rupture.

Décès de Sly Stone, le 9 juin dernier. Sly and the Family Stone reste au cœur de mon admiration pour la musique afro-américaine, qu’il s’agisse du funk, de la soul ou du jazz. Une autre étoile qui recherchait une réelle «Great America» fraternelle s’est éteinte, faisant ses adieux à l’Amérique de Trump.

Le 11 mars 2011, la date de la triple catastrophe dans la région de Tohoku : le tremblement de terre, le tsunami et l’explosion du central nucléaire de Fukushima-Daiichi. Cette catastrophe, et en particulier le tsunami, a agi comme un révélateur, mettant en évidence les failles du Japon d'après-guerre. Parallèlement, elle a eu un impact important sur ma façon de vivre et mon approche professionnelle.

Dans le massif des Maures (Var), je viens de photographier un immense chêne-liège millénaire. Ça fait du bien de pouvoir rencontrer des êtres vivants qui dépassent notre échelle et notre imagination.

Herbier de prison de Rosa Luxemburg. Un recueil d’herbiers et de lettres réalisés durant sa vie d’incarcération entre 1915 et 1918. C’est l’herbier le plus humble et le plus beau que je connaisse.

Le film documentaire In Jackson Heights (2016) de Frederick Wiseman. Trois heures d’un tableau vivant du quartier le plus cosmopolite de New York, où 167 langues sont parlées. Pour moi, si «America is great», c’est grâce à cette force démocratique et multiculturelle qu’on observe dans ce film.

« Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente.

Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte.

Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde. »

Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme (1950)

Le quartier d’Okubo à Tokyo. C'était autrefois un quartier coréen, mais aujourd'hui c'est un lieu hétéroclite, avec toutes sortes de boutiques et de restaurants asiatiques. J’y déjeune toujours quand je suis à Tokyo.

Chaque fois que je prends la ligne 14 du métro à Paris, j’ai un peu l’impression d’être dans le métro de Tokyo. Sinon, au début du printemps, le jardin du Musée du quai Branly, avec la floraison des magnolias japonais : le Magnolia kobus (Kobushi) et le Magnolia stellata (Shide-Kobushi), qui sont tous les deux magnifiques.

Retrouvez les photos de Tadashi Ono dans le Kometa Japon